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26 décembre 2007

Une dame en bleu (suite)

Le début se trouve : ici

La suite 2 : ici

Quand ils parvinrent chez lui, à quelques rues de là, il lui proposa d’entrer. Elle refusa poliment n’acceptant même pas de pénétrer dans la cour de la maison. Elle préféra attendre sur le trottoir, à l’ombre d’un des tilleuls qui bordaient la rue dénommée « Rue de la Mine ». Il hésita un instant puis monta l’escalier précipitamment et disparut derrière la porte.

Il emprunta le couloir et se rendit directement dans la cuisine. Sa mère, qui, pour une fois qu’elle en avait le temps, lisait, eut l’air surprise de le voir.

« Tu ne répètes plus ?

- ben... »

Elle devina tout de suite son embarras.

« Qu’est-ce qui ne va pas ? Tu as un souci, des ennuis ?

-Non… hésita-t-il, non, j’allais quitter l’église et une dame est arrivée...

- Une dame ? s’écria-t-elle.

- Je ne la connais pas. Elle m’a entendu jouer, je ne l’avais pas remarquée d’ailleurs. En sortant elle m’a demandé où elle pourrait passer la nuit ?

-Quoi ?

-Je ne sais pas d’où elle vient, ni qui elle est. Elle m’a posé la question presque tout de suite, parce qu’elle a beaucoup marché. Voilà, c’est tout.

-Et tu l’as conduite jusqu’ici, c’est ça ? Mais nous n’avons pas de place, nous ne la connaissons pas, on ne sait pas ce qu’elle veut…

-Elle est drôle, l’interrompit le garçon gêné, non, pas drôle, bizarre… enfin, pas comme vous ! Elle parle tout doucement. Elle est toute simple, habillée tout en bleu, douce et toute calme…

-Oui… elle a de quoi manger ? »

A cette question, le jeune homme comprit que sa mère était prête à l’aider. Il se rassura.

« Je vais en parler à ton père, viens avec moi. »

Ils montèrent  dans la chambre. Son père se remettait lentement d’un infarctus. Il était calé sur deux oreillers, assis dans son lit et lisait aussi.

« Que se passe-t-il, interrogea-t-il ironiquement, mais il avait l’air fatigué, je vous entends d’ici ! Il y a quelque chose de grave ? »

Pendant que sa mère expliquait ce qui arrivait, l’adolescent observait son père, les traces de fatigues sur son visage, ses joues creusées, ses yeux brillants.

« Elle voudrait dormir ici ? demanda le malade

-Non, répondit son fils, elle cherche juste un endroit pour la nuit, mais elle ne veut déranger personne.

-Je ne vois pas, réfléchissait le père.

-J’ai bien une idée, osa le garçon.

-Je t’écoute…

-Le local scout...

- Mais il est toujours en désordre, depuis que l’on n’y met plus les pieds ! »

Son père s’occupait en effet de la troupe scoute de la cité, une de ses multiples activités d’ailleurs. Mais depuis sa maladie, tout était arrêté et le camp d’été auquel les jeunes s’étaient préparés avait été annulé. Tout le matériel encombrait encore les locaux de la troupe sans que personne ne pensât à y effectuer un quelconque rangement depuis l’accident cardiaque du “chef”. Sans parler de la poussière qui avait du s’accumuler. Néanmoins, son fils, ému, se rendait compte qu’il allait céder. Il se souviendrait toujours de cette discussion « entre hommes », une des rares qu’ils eurent tous les deux. Et de plus, il obtenait quelque chose de lui sans presque argumenter.

«  Tu es sûr qu’elle ne voudra pas dîner avec nous ? » Cette question l’interloqua. « Oui, elle ne veut rien qu’un toit pour cette nuit ». Le père haussa les épaules et lui dit de prendre les clefs du local dans la vieille veste qui dormait sur le dossier d’une chaise de la chambre, depuis son malaise, et il refusait qu’on la changeât de place. Ce dernier demanda tout de même à son fils : « On peut lui faire confiance, tu penses ? ». Il s’adressait à lui comme à un adulte ! « Oui je pense, elle est très douce, presque silencieuse, et son regard…

- Oui ?

- Euh et bien elle regarde droit dans les yeux et tu te sens tout de suite en confiance.

- C’est ton jugement. Va la conduire, hein maman, on peut accepter ? » Elle acquiesça d’un signe de tête. (A suivre)