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11 décembre 2006

Les lueurs de la Mariette

Ce soir il est plus en forme, si l’on peut dire. Il se sent un peu mieux. Il ne se traîne plus mollement. Depuis ce matin sa démarche est plus assurée. A son retour de l’hôpital, il avait ressenti une faiblesse quasi insurmontable. Il s’était senti en fin de vie. Aujourd’hui, il reprend espoir en même temps qu’un peu d’énergie. Il installe son fauteuil devant la fenêtre du salon et s’y assied. Il regarde le soir tomber. Dehors, de l’autre côté de la rue émerge un petit immeuble en construction. Autrefois étaient entretenus à cet endroit des petits jardins, certains avec une petite maison.

Il se souvient de l’une d’elle, grise et basse. Tous les soirs il y voyait des lueurs rouges et jaunes danser derrière une fenêtre à rideaux blancs, l’hiver comme l’été. C’était la maison de «  la Mariette  », comme on l’appelait dans le pays. Il se souvenait de la petite vieille sans âge et voûtée. Elle sortait de chez elle toujours coiffée d’un foulard gris, qui laissait à peine deviner ses cheveux blancs, et toujours munie d’un cabas noir. Elle faisait un va et vient deux à trois fois par jour, le dernier à l’entrée de la nuit. Il la soupçonnait d’aller chercher du bois dans la forêt, sur la colline, juste derrière les jardins, où d’aller en chaparder dans les enclos voisins. Il l’avait croisée à plusieurs reprises. Elle le saluait dignement puis trottinait jusqu’à la maisonnette avec son lourd cabas. Elle s’y engouffrait rapidement et, quelques temps après, il voyait les lueurs danser…

Quand il eut plus de mal à marcher, il s’installa souvent près de la fenêtre pour observer le manège quotidien de la Mariette. Il était presque déçu quand il ne la voyait pas rentrer, le soir. Mais il souriait quand les flammes jetaient leur lumière sur la fenêtre, au fond du jardin. Et ce rituel dura des années…

Lors de sa première hospitalisation, il eut bien du mal à s’imaginer éloigné de son quartier, de la maisonnette et de la Mariette. Lorsqu ’il rentra chez lui il reçut un énorme choc qui le laissa prostré plusieurs jours. La fenêtre de la Mariette ne s’illuminait plus… Il comprit et céda à un chagrin inexplicable mais profond. Quelques jours plus tard, d’énormes machines vinrent chambouler jardins et maisonnettes. Au retour de sa seconde hospitalisation, un immeuble commençait à s’élever, en face de chez lui.

Ce soir, il peut encore apercevoir la colline et sa forêt. Le ciel est entre chien et loup. Il se souvient… Tout à coup, il croit voir une petite ombre voûtée se faufiler là haut, à pas menus, si petite, et disparaître dans les futaies. Un profond bien-être l’envahit aussitôt. Il se promet qu’à partir de ce jour, il viendra chaque soir regarder la colline ou même, simplement, le firmament.

Commentaires

J'aime ces textes à la mémoire des inconnus ! de ceux qui ne sont rien et qui ne savent pas ce qu'ils représentent pour nous.

Je me suis longtemps appuyée sur un collègue, j'avais l'impression d'abuser de sa gentillesse, de l'épuiser avec mes soucis. Et puis quand nous avons appris que je changeais d'école, je l'ai vu les larmes aux yeux, je n'avais jamais soupçonné que moi aussi je lui apportais quelque chose.

Il y a quelques années de l'autre côté du carrefour, habitait une dame âgée de 80 ans, nous ouvrions nos volets au même moment et puis le temps a fait son œuvre … mais il m'arrive encore certains matins de guetter vainement l'ouverture de ses volets …

Écrit par : Sar@h | 11 décembre 2006

très joli texte, melancolique mais tellement vrai!
il faut continuer à regarder la colline et peut-etre un petit coin de ciel bleu!

amitiés
noelle

Écrit par : noelle | 12 décembre 2006

Ces êtres qui nous frôlent, ui composent notre quotidien, acteurs inconnus de nos vies.
Quel plaisir de relire vos lignes pleines d'amour et d'humanité !

Écrit par : Michoko | 12 décembre 2006

trés jolie ce texte il donne chaud au coeur. chaque geste ou même un sourire a son importance, un regard qui nous dit bonjour.toute ces petites choses de la vie qui sont si importante .....
contente de te retrouver!
bisous

Écrit par : melancoly | 13 décembre 2006

j'aime aussi ce côté secret des choses, sans fanfares, juste l'amour.

Écrit par : Fleur | 15 décembre 2006

Magnifique, merci.

Écrit par : xavier | 16 décembre 2006

« Le commerce mondial a été multiplié par onze depuis 1950 et la croissance économique par cinq et pourtant au cours de cette période, il y a eu un accroissement sans précédent de la pauvreté, du chômage, de la désintégration sociale et de la destruction de l'environnement. Il n'y a donc pas de preuve que le commerce ou le développement économique soient d'une grande valeur pour l'humanité.»

Écrit par : koan | 22 décembre 2006

merci pour ce si joli texte cher Rony

Écrit par : holly | 26 décembre 2006

Et toi, que deviens-tu ? J'ose espérer pour toi quelques ripailles ces jours-ci.
Je t'embrasse sur les deux joues, c'est de rigueur ces jours-ci.
Et donne un peu de tes nouvelles, les messages d'amour et de paix sont de vogue ces jours-ci.
Je te souhaite de te porter bien, et pas seulement ces jours-ci...

Écrit par : Fabrice | 28 décembre 2006

tous mes voeus de bonheur a toi et a tous ta famille

Écrit par : jean-charles | 01 janvier 2007

Bonne et heureuse année Rony .
Khate

Écrit par : khate | 01 janvier 2007

Bonne année Rony. qu'elle soit de douceur et de joie.
et que le petit clown reviennent nous dire ses élucubrations... jusqu'à ce que les sans-âmes ouvrent leurs coeurs!

Écrit par : kintana | 01 janvier 2007

Sincèrement, mes meilleurs voeux pour 2007, qui s'annonce d'ores et déjà chargée.
Amitiés
Mike

Écrit par : Mike | 02 janvier 2007

tous mes voeux Rony , pour une année plus douce ....

Écrit par : debla | 02 janvier 2007

Que cette nouvelle année apporte joie et réconfort ! qu'elle te soit douce cher Rony... et oui, pourquoi pas... encore un peu de temps, les nuits sont glacées mais cela va s'arranger bientôt...

Écrit par : holly | 03 janvier 2007

Les commentaires sont fermés.