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07 juin 2006

Le Zahir et la Possibilité d'une île

Comment parler des livres sans paraître ou pédant ou prétentieux, sans donner, surtout, dans l’attitude du critique qui sait, qui juge, qui dicte, vindicte, édicte, caresse ou vilipende selon son humeur elle-même issue d’un engagement express envers son employeur ou conditionnée par un éventuel renvoi d’ascenseur dû à quelqu’un ou attendu d’i celui ? En disant simplement que l’on aime, que l’on n’a pas pu lire jusqu’au bout, que l’on n’a rien compris, que l’on déteste. Voilà tout. A quoi donc sert-il de vouloir disséquer, je vous le demande ? Et de quel droit ? Et en vertu de quelle expertise ? J’aime ou je n’aime pas. Le livre m’a parlé, je l’ai entendu. Ou alors je n’y ai trouvé qu’insignifiance, selon mon goût que je n’impose à personne. Par contre, je revendique le droit de le dire. Le droit pour chacun de le dire et de pouvoir expliquer pourquoi. Cela ne mange pas de pain. Et qui s’en offusque passe son chemin. Ceci posé, je viens de terminer la lecture de deux livres et il me démange d’en parler sans langue de bois (c’est bien ce qu’il faut dire, non ?). Un roman et  une expérience.
 

Michel Houellebecq et « la possibilité d’une île »(Fayard - Août 2005) Second livre de l’auteur, lu en quelques mois. Le dernier certainement. Son île affleure à peine au dessus d’une eau étrangement opaque, obscurcie par d’étranges particules déjà rencontrées ailleurs.  Comment expliquer ? Le narrateur, les narrateurs clones les uns des autres ont une voix monocorde comme son écriture élémentaire… Cherchez la littérature, vous ne trouverez que des ratures superposées, des raccords de désenchantement, des répétitions, y compris d’un livre à l’autre et une histoire longue et rasante du toujours même qui ne parle que de lui. Il s’imagine scrutant les signes de l’agonie du monde humain et lui trouve une échappatoire par le biais d’une re-création à la sauce « quantique » entamée dans « les particules », qui mènera à la suppression des sentiments, des sensations, de la compréhension de l’autre et à une sorte de pérennisation de la peur de disparaître. Obsession de sexe associé à la haine du vieillissement,   salissure de la femme, vitupération contre la civilisation, racisme rentré et ironie sur les penseurs qui ont précédés ses élucubrations. Teilhard de Chardin, qu’on souscrive ou non à sa conception de l’évolution du monde, avait une autre stature que les petits savants scientistes qui s’ébrouent dans les romans de Houellebecq. Cela n’empêche pas ce dernier de le piétiner de la pire façon. Bref, on rêve en vain d’un possible rayon de soleil sur un récif de corail au bord de cette île.  Certains y auraient trouver un hymne à l’amour et un nouvel humanisme, cela ressemble aux vieilles casseroles que l’on ressort pour doper un produit sans intérêt mais qu’il faut vendre. Cela a l’air de marcher, mais j’irai me noyer ailleurs que dans ces eaux troubles.

 

Paulo Coelho et « le Zahir »(Flammarion - Mai 2005)  Le récit du parcours singulier d’un homme, qui pourrait être l’auteur lui-même, à la recherche de son moi profond et d’un sens à sa vie. A travers ses pérégrinations sur la planète et dans les rencontres avec les êtres les plus divers et singulièrement humains, il découvre et délivre peu à peu le message de vie de « l’énergie de l’amour ». Le prétexte de cette quête est la disparition de son épouse Esther vers laquelle il va tenter de guider ses pas avec l’aide de plusieurs personnages soit inspirés, comme Mikhaïl rencontré à Paris, sorte de missionnaire envoyé sur sa route pour le guider un temps, soit remplis de sagesse, comme le vieillard qui enseigne à Esther une partie de ce fameux message. Je ne dirai rien du dénouement, par respect pour les éventuels lecteurs du livre qui n’est pas qualifié de roman. Au passage, l’auteur décrit la civilisation actuelle par de courtes évocations comme la chute du communisme, la réalité de la vie de clochards, les contraintes du système commercial qui le poussent à sacrifier parfois à la cérémonie de l’auto promotion, les guerres et le travail des journalistes , dont Esther, qui les couvrent. Il jette sur le monde et sur lui-même un regard de plus en plus tolérant,  de plus en plus curieux et ouvert, aidé en cela par l’approche des diverses croyances, la signification et l’approfondissement de la spiritualité, la découverte de la nécessité du don et du dépassement de soi pour l’établissement d’un avenir plus humain. La lecture de ce livre est envoûtante à cause d’une écriture fluide, directe. Les personnages vivent chacun leur aventure sans fioriture inutile et le discours reste simple, loin de la grandiloquence et des platitudes.