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17 mars 2007

Je vis dans ma grotte

Comme j’aimerais que cette note soit la dernière des « Voies de solitude » ! Mais…

Je vis désormais complètement dans ma grotte. Elle n’est pas terminée, loin s’en faut. Cependant j’ai besoin d’elle pour respirer plus librement. Toute blanche, toujours, parsemée de quelques taches bleues posées par une main féminine aimée aux fenêtres et à la porte-fenêtre. Comme des coups de pinceaux bleus sur une toile blanche du plus bel effet. Pour la décoration je m’en tiens là pour le moment. Le reste viendra plus tard, sans doute produit avec mes mains (peintures et dessins), nous verrons bien. L’éclairage est encore fait d’ampoules nues, sur les murs et au plafond. Je m’en accommode car je n’aime que la simplicité… Dans la pièce principale, une table paysanne en chêne massif ainsi que les six chaises, un plaisir que je me suis offert à peu de frais heureusement, j’aime la rusticité de ce meuble. A droite de l’entrée, un canapé clic-clac bleu, lui aussi ! Éric m’a installé des étagères murales pour ma bibliothèque et, en plus petit avec les mêmes matériaux, un meuble télé-bar ajouré. Simplicité, toujours et encore…  Mes livres ont une histoire. Ils étaient éparpillés depuis plus de quatre ans chez mon fils Cédric et chez mon ami convalescent Gérard. J’ai récupéré ceux stockés chez Gérard. J’ai du en jeter plusieurs, mangés par l’humidité et la poussière. Je m’empresse de préciser que mon ami n’y est pour rien. L’un des sacs plastiques que je lui avais remis était humide, la poussière a fait le reste… Après avoir nettoyé les autres, je les ai alignés sur deux rayonnages et demi (sur cinq) derrière la grande table. La chambre, quant à elle, est en bois de pin, claire. Un lit deux places ( ?!?), une commode et une armoire penderie, le tout neuf ! Une chambre presque monacale, qui convient parfaitement à mon tempérament.

Voilà donc l’essentiel de ma grotte. Et j’y vis… j’y existe plutôt. Je ne suis plus le même. Des rouages sont grippés et j’ai la sensation de n’être plus qu’une apparence. Le cheveu plus court, la barbe plus épaisse, le visage émacié et les joues creusées par un amaigrissement visible. Les yeux, toujours verts, ne sourient plus réellement, je n’aime pas leur tristesse. Consciemment ou non, je me sens revêtu d’une armure d’airain, une carapace destinée à ne laisser rien paraître de mes sentiments réels, et j’y réussis fort bien. Je donne le change…

La dame, elle, semble libérée. Elle a une démarche de femme libre, une allure dégagée et presque gaie. Elle a, semble-t-il, retrouvé « son » milieu. Je ne pensais pas l’étouffer, l’empêcher de vivre... Je lui avais tout donné de moi, sans pesanteur, même silencieusement parfois. Je ne désirais que ce don. Je n’attendais rien. Et pourtant c’est de sa main que j’ai reçu cette épouvantable douleur que je croyais impossible. Cette souffrance atroce, que je n’avais jamais connue, est augmentée par le fait qu’elle avait préparé cette fin d’histoire fort discrètement, à mon insu et sans doute avec l’aide de sa fille, forcément. J’ai été comme un clown à qui on jouait la comédie pendant plusieurs jours, voire plusieurs semaines. On a « fait semblant » pour que je ne m’aperçoive de rien. Du même coup, on a tué mes espoirs, une partie de mon âme et écrasé mon cœur pour longtemps. La franchise aurait sans doute rendu les choses moins amères…

Enfin, je le répète, j’existe encore un peu. Je veux garder mon chez moi très simple, très humble. Je ne veux pas d’un cocon mouroir ni d’une bonbonnière maison de retraite. J’ai encore quelques pas à faire, même si je sais que l’avenir n’existe pas, parce qu’insaisissable. Quand on croit y accéder, il se transforme en présent… Il n’y a pas d’échappatoire ! Quelques pas encore, même si je sais qu’un jour l’horizon, jamais atteint lui non plus, finira par se figer dans une nuit définitive. Définitive comme la souffrance.